Que disent les Français que je croise ou qui m’écrivent à ce propos ? La plupart ne comprennent pas une telle précipitation (Où est l’urgence sanitaire ?) ; beaucoup nous interpellent sur les risques liés à l’administration d’une telle quantité de vaccins dans un délai aussi court, sur les éventuels effets secondaires, sur la nocivité avérée ou non des adjuvants...
Les réserves ici émises ne concernent pas l’importance de la vaccination - qui a permis et qui permet encore d’éradiquer certaines maladies mortelles -, mais le caractère perçu comme péremptoire et non justifié d’une mesure décidée en toute hâte sur un sujet très sensible pour bon nombre de nos concitoyens.
Or, pour reprendre les propos de Pasteur lors de l’inauguration en 1888 de l’Institut éponyme : « Ayez le culte de l’esprit critique. Sans lui, tout est caduc. Il a toujours le dernier mot ».
Appliquons donc cet esprit critique - qui n’est pas propre au domaine scientifique - à notre démarche démocratique : les députés vont être amenés à voter un texte dès le 24 octobre alors que les travaux préliminaires, d’examen, d’études, d’auditions… n’auront pu être menés dans les conditions d’un débat démocratique sérieux sur un sujet très complexe.
Bref : notre esprit critique n’aura pas le loisir de s’exercer sur les différentes et multiples facettes du vote qui est demandé à notre Assemblée. Pourquoi ? Parce que l’article concernant l’obligation relative aux 11 vaccins est tout simplement inséré dans le PLFSS, lequel doit être voté avant le 31 octobre.
Voter un texte sur un sujet qui concerne la santé publique, celle des très jeunes enfants, dans un contexte de méfiance voire de défiance des Français envers la vaccination ne peut se faire sans avoir pris le temps d’écouter toutes les parties prenantes au débat : qu’elles soient pour, qu’elles soient contre, qu’elles émettent des réserves sur certains vaccins, des doutes sur certains adjuvants, qu’elles considèrent que la vaccination doit s’envisager sous l’angle de la solidarité collective ou sous celui de la responsabilité individuelle…
Aucun point ne peut, ne doit être omis, et encore moins balayé d’un revers de la main.
Rétablir la confiance, tel était le thème de la campagne d’Emmanuel Macron. Or celle-ci ne s’acquiert pas par la contrainte mais par la pédagogie. Entendons cette attente simple et de bon sens qui est celle de vouloir savoir, d’évaluer les risques et les bénéfices pour chaque vaccin selon ses spécificités (et cessons de parler de la vaccination dans sa globalité), en fonction de données précises, qu’elles soient épidémiologiques, sociologiques, éthiques voire économiques.
Comment poser en ces termes des échanges à la fois exhaustifs et sereins alors même qu’ils vont être noyés dans un débat élargi au financement de la sécurité sociale ?
Remettons les choses dans le bon ordre : passer par l’obligation vaccinale, c’est faire aveu de l’échec des dernières décennies de politique vaccinale. On ne peut s’y résoudre : il serait plus logique de faire d’abord les efforts nécessaires en termes de recherches, d’études, de pédagogie, de communication et de formation des personnels de santé avant que d’envisager toute imposition.
Voilà pourquoi il faut extraire l’obligation vaccinale du PLFSS et se donner le temps d’un débat sérieux et exigeant. ■