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Municipales : en Vert et contre tous

Curieuses municipales que celles que nous venons de vivre avec un premier tour qui s’est tenu in extremis dans des conditions particulières liées à la crise de la Covid-19 et un second tour reporté de trois mois qui ont permis aux candidats écologistes de rafler la mise dans de nombreuses villes. C’est aussi l’abstention record que l’on retiendra de ces municipales 2020. Quelques enseignements à retenir.

La crise sanitaire a fait de ces municipales un scrutin très particulier. Après un premier tour maintenu en dépit du coronavirus qui circulait alors en France, le second tour a lui aussi été affecté. Avec comme premier enseignement, un taux d’abstention record : 58,4 % des 16,5 millions d’électeurs inscrits ne se sont pas déplacés dans un bureau de vote dimanche 28 juin. Du jamais vu au niveau national ! Ce taux est encore supérieur à celui, déjà élevé, du premier tour (55,34 %). Il dépasse de 20 points celui du second tour des municipales de 2014 (37,87 %).

Deuxième enseignement, la percée incontestable des candidats verts ou s’affichant comme tels qui ont ainsi confirmé les résultats obtenus aux dernières élections européennes. Les candidats d’Europe Ecologie les Verts ont, sous leur propre bannière ou en nouant des alliances avec la gauche, su convaincre les électeurs dans de nombreuses villes et pas des moindres : Marseille, Lyon, Bordeaux mais aussi Strasbourg, Besançon, Tours, Poitiers, Colombes…

Il faut aussi parler de l’échec des candidats LREM qui n’ont pas su s’imposer dans ce qui était pour le parti du président son premier scrutin local. L’échec a été particulièrement violent pour les têtes de liste LREM Agnès Buzyn à Paris et Yvon Berland à Lyon qui n’obtiennent même pas de siège au conseil municipal. Le parti présidentiel ou ses alliés s’ils ont perdu Biarritz, Bourges ou Nancy peuvent toutefois se consoler d’avoir conservé Mont-de-Marsan, Angers et Tourcoing. Signalons encore Pau qui reste entre les mains de François Bayrou, président du MoDem et bien sûr Le Havre remporté par le Premier ministre Edouard Philippe.

Des ministres pas à la fête

Pourtant encouragés par le Chef de l’Etat, les 10 ministres-candidats n’ont guère brillé. Si 5 ont été élus au premier tour, Gérald Darmanin (comptes publics) est le seul ministre à avoir été élu maire à Tourcoing (Nord). Edouard Philippe a été élu au second tour. Gabriel Attal n’a été élu que conseiller municipal d’opposition à Vanves. Marlène Schiappa (égalité femmes-hommes) a été battue et ne sera pas conseillère municipale dans le 14ème arrondissement de Paris. Même sort pour Agnès Pannier-Runacher (économie) battue dans le 16ème arrondissement de la capitale. Ont été élus conseillers municipaux Franck Riester (Culture) à Coulommiers (Seine-et-Marne), Sébastien Lecornu (Collectivités territoriales) à Vernon (Eure), Geneviève Darrieussecq (Armées) à Mont-de-Marsan (Landes) et Marc Fesneau à Marchenoir (Loir-et-Cher). Jean-Baptiste Djebbari (Transports) a été éliminé à Limoges (Haute-Vienne) dès le premier tour.

Globalement, l’équilibre de la couleur politique des villes de plus de 20 000 habitants reste stable. Elles ne sont que soixante à avoir basculé d’un camp à l’autre (13 %) à l’issu du premier ou du second tour. Au final, on dénombre 261 villes à droite, 149 à gauche - qui a perdu autant de villes qu’elle en a gagné -, 21 à la majorité présidentielle, 12 aux écologistes, 6 au Rassemblement national dont Perpignan (+100 000 habitants) remportée par Louis Aliot, et 5 divers.

Enfin, fait notable, cinq des dix plus grandes villes ont été remportées par des femmes : les socialistes Anne Hidalgo à Paris et Martine Aubry à Lille conservent leur siège, Jeanne Barseghian (EELV) gagne Strasbourg et à Marseille, l’écologiste Michèle Rubirola, soutenue par la gauche est arrivée en tête mais le jeu des alliances pourrait tout de même permettre à sa rivale LR, Martine Vassal de lui souffler la victoire finale.

A l’Elysée, après les résultats décevants de ces municipales, on veut passer à autres choses. Il s’agit d’« enjamber les municipales » comme on a pu l’entendre dans la bouche des uns et des autres. Le Chef de l’Etat a d’ailleurs très vite repris l’initiative avec un agenda chargé et de nombreux entretiens prévus en vue notamment du remaniement. Les conclusions de la convention citoyenne sur le climat sont aussi particulièrement bien tombées lui permettant ainsi de faire plusieurs annonces sur et autour du sujet. Et puis surtout, l’entourage du Chef de l’Etat insiste bien « Il n’y a pas d’enseignement à tirer à l’échelle nationale de ce scrutin local ». Reçu fort et clair ? 

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