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Accélérer sur le nucléaire

Le gouvernement a présenté un projet de loi pour accélérer sur le nucléaire.

Après le projet de loi pour accélérer sur les énergies renouvelables en discussion début décembre à l’Assemblée après avoir été voté au Sénat et face à une demande en électricité de plus en plus pressante, le gouvernement a également présenté début novembre un texte en conseil des ministres visant à accélérer la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. Le texte pourrait être examiné en début d’année 2023, d’abord à l’Assemblée nationale. En déplacement à la centrale de Chinon (Indre-et-Loire), la ministre de la transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher en avait alors expliqué les motifs : « Si nous voulons à la fois avoir une indépendance énergétique mais également tenir nos objectifs climatiques, il faut remplacer les énergies fossiles par des énergies bas carbone. Le nucléaire est aujourd’hui l’énergie le plus bas carbone de toutes les solutions dont nous disposons ».

Alors que la demande est forte et le sera à l’avenir mais en même temps qu’il faut tenir les objectifs de neutralité carbone en sortant des énergies fossiles, le Chef de l’Etat a finalement opté pour le développement de réacteurs EPR de nouvelles génération, parallèlement au développement des énergies renouvelables. Alors que la France dépend pour 70 % du nucléaire pour son électricité, il avait été décidé en 2015 de tourner progressivement le dos à l’atome en fermant 14 de ses 58 réacteurs (2 sont déjà fermés). Mais en 2021, le gouvernement a fini par faire volte-face.

Face à une certaine urgence énergétique, le projet de loi présenté vise justement à « gagner du temps ». « Si le Parlement décide de mettre en œuvre le programme EPR », le texte pourrait permettre de « démarrer une part des travaux sans attendre » et « gagner ainsi jusqu’à deux ans ». Il acte la construction de six EPR avec une option pour huit autres en simplifiant les procédures administratives : les sites pourraient être dispensés d’autorisation d’urbanisme, le contrôle de conformité était assuré par les services de l’Etat ; et les travaux sur les bâtiments ne recevant pas de substances radioactives pourraient démarrer avant la clôture de l’enquête publique. Le droit de l’expropriation sera assoupli si des terrains adjacents sont nécessaires mais « sans toucher aux habitations » a encore ajouté le ministère.

Installés sur des sites de centrales déjà existantes, les deux premiers EPR seront construits à Penly (Seine-Maritime) et à Gravelines (Nord). Quant au troisième EPR, le choix n’a pas encore été arrêté mais l’option la plus probable serait Bugey ou Tricastin dans la vallée du Rhône. Selon le calendrier envisagé, le président de la République pourrait poser la première pierre à la fin de son second mandat, avec une mise en service du tout nouvel EPR en 2035 ou 2037, pas avant.

Pour autant, la présentation du projet de loi a suscité quelques inquiétudes. Le Conseil national de la transition écologique (CNTE), qui regroupe syndicats, patronat ou encore des ONG s’est notamment ému des « délais insuffisants » laissés pour se prononcer sur le projet de loi. Il a pris soin par ailleurs de préciser que ce texte « ne saurait préjuger des conclusions du débat public ». « Ce texte porte sur les procédures administratives, il ne porte pas sur combien d’EPR dans notre mix énergétique en 2050 » a voulu rassurer la ministre, « ce projet de loi ne préempte pas les concertations en cours ni les futures lois énergie climat qui décideront ». A compter du second semestre 2023, les parlementaires auront à se prononcer sur la stratégie énergétique de la France. Et entre temps, les Français pourront également donner leur avis sur la construction des six EPR au cours d’un débat public. Sans oublier le débat sur l’énergie menée par le gouvernement jusqu’au 31 décembre à retrouver en ligne sur concertation-energie.gouv.fr. Pour alimenter le débat et la réflexion, les Français pourront consulter les scénarios à 2050 de RTE et de l’Ademe qui jouent tous la carte du renouvelable avec une part plus ou moins importante du nucléaire dans le mix énergétique (un scénario n’envisage pas de nucléaire avec des conséquences en matière de sobriété). 

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