Sur le papier, l’Office dédié à la sauvegarde de la biodiversité « est chargé de la protection et la restauration de la biodiversité, en métropole et dans les Outre-mer ». Sur le terrain, les 1 700 policiers de l’environnement (sur un total de 3 000 agents de l’OFB) veillent notamment au respect de la législation environnementale (respect de la biodiversité) par les agriculteurs. Ils s’assurent du stricte respect des normes en matière phytosanitaire, qualité de l’eau, haies, etc. Mais les méthodes de ces policiers armés déplaisent aux agriculteurs qui leur reprochent leurs inspections tatillonnes qu’ils prennent pour du harcèlement et leur mènent la vie dure. « Aujourd’hui, on a le sentiment que ce que veulent les agriculteurs, c’est de ne plus nous voir dans leurs exploitations. C’est du même ordre que si les dealers demandaient aux policiers de ne plus venir dans les cités » s’est agacé sur X Benoît Pradal, du syndicat Snape-FO de l’OFB. Et même si ces propos n’ont pas été cautionnés par la présidente du conseil d’administration de l’OFB, Sylvie Gustave-dit-Duflo - « Je condamne ses propos. Faire l’amalgame entre les agriculteurs et les dealers, ce n’est pas correct, ce n’est pas l’optique dans laquelle nos contrôleurs travaillent admet-elle. Cela fait un an et demi que nos agents sont sous pression et stigmatisés. Nous avons relevé plus de 54 exactions à leur égard, tels des établissements murés ou saccagés. Malgré tout, ils ont gardé leur sang-froid » -. Mais cet énième épisode a rallumé le feu entre l’Office et le monde paysan. Sans compter que l’exécutif, divisé sur le sujet, est venu à son tour souffler sur les braises. « Les propos de l’agent de l’OFB témoignent d’un état d’esprit qui trahit les missions de cet organisme. Ils portent atteinte à l’image des agriculteurs, dont le rôle, nourrir la population au prix d’un travail exigeant, doit être soutenu » a écrit sur X la ministre de l’Agriculture Annie Genevard tandis que sa collègue à la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher prenait la défense de l’OFB. « J’appelle à remettre les choses en perspective, on n’est pas sur la réalité que projettent beaucoup de responsables sur le sujet. Administrativement, une exploitation agricole est contrôlée une fois par siècle en moyenne, relativise la ministre de la Transition écologique, dont dépend l’OFB. Plutôt que de trouver des victimes expiatoires au sein de l’OFB, rendons plus lisibles la législation et les normes à appliquer » précisait la ministre de la Transition écologique. « Allons-y sur cette simplification des normes et mettons en place le contrôle unique. Cela facilitera le travail des agents et aussi celui des agriculteurs » a immédiatement rebondi Sylvie Gustave-dit-Duflo qui rappelle que « seuls 7,5 % des contrôles annuels exercés par l’OFB ont un rapport avec le monde agricole ».
Lors de son discours de politique générale, François Bayrou a mis les pieds dans le plat en qualifiant d’« humiliation » et de « faute » certaines inspections d’agents auprès des agriculteurs, « une arme à la ceinture dans une ferme déjà mise à cran par la crise ». Des propos considérés comme « une faute » par la présidente de l’OFB qui, dans la foulée, a demandé « à ce gouvernement de nous soutenir, de nous appuyer et de reconnaître les missions que nous exerçons ». Le Directeur de cabinet de François Bayrou s’est fendu d’un coup de fil à la présidente de l’OFB pour aplanir les tensions. De son côté l’Union intersyndicale a demandé aux agents « de ne plus réaliser aucune mission de police, que ce soit en police administrative ou en police judiciaire, vers le monde agricole » jusqu’au excuses publiques du Premier ministre. « Matignon a pris conscience de l’importance du sujet » a reconnu Agnès Pannier-Runacher. « La mission flash que nous avons demandée propose un droit de recours pour les agriculteurs sur les modalités des contrôles. En outre, les caméras-piétons portées par les inspecteurs devraient faire baisser la pression lors des opérations de terrain entre les paysans et les agents. Enfin, je souhaite que l’OFB forme ses agents sur le métier d’agriculteur et ses contraintes, et réciproquement, pour une meilleure compréhension mutuelle » a fini par ajouter la ministre. Menacé de dissolution comme l’agence Bio, l’Office français de la Biodiversité, ses agents et ses méthodes en agacent pourtant plus d’un chez les parlementaires. « On assiste à une judiciarisation de leur action. Ils sont davantage assimilés à des relais du procureur et du parquet. Nous ne sommes pas favorables à la suppression de l’OFB, mais il faudrait réfléchir à travailler d’une autre manière » a ainsi déclaré François-Xavier Ceccoli (LR, Haute-Corse) à l’occasion d’une audition des dirigeants de l’Agence Bio et de l’OFB menée à la veille de la réunion de la commission mixte paritaire sur le projet de budget 2025. D’autres élus ont raconté les déboires d’agriculteurs de leurs circonscriptions face aux agents de l’OFB. Face aux critiques, Olivier Thibaud, le directeur général de l’OFB a toutefois tenu à rappeler que le nombre de contrôle a été divisé par trois l’an dernier, après la crise agricole, « passant de 3 000 à un millier par an, soit une probabilité pour une exploitation d’être contrôlée tous les 380 ans ».
Agence Bio et Office Français de la Biodiversité ont finalement échappé à leur suppression. ■