L’Association des Maires de France, l’Association des Petites Villes de France, les associations Villes de France, Intercommunalités de France et France urbaine sont remontées. Elles ne veulent pas entendre parler du projet de consigne pour le recyclage des bouteilles en plastique prônée par le gouvernement qui mène une concertation sur le sujet depuis janvier et qui s’achèvera en juin (la mesure avait été finalement retirée lors du vote de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) en 2020). Dans un communiqué commun, les associations d’élus locaux n’ont pas de mots assez durs pour dénoncer cette « fausse consigne » qui selon eux n’apporterait rien de plus à ce qui existe déjà aujourd’hui. Pire encore, la mesure « contreproductive » « n’aurait d’autre conséquence que de complexifier le geste de tri pour les citoyens (depuis le 1er janvier 2023, tous les emballages peuvent être jetés dans le bac jaune), et d’encourager indirectement la consommation de bouteilles en plastique, ce qui irait à rebours du sens de l’histoire à l’heure où le G7 se fixe enfin des premières ambitions de lutte contre la pollution ». L’idée de l’exécutif est de faire payer plus cher, une vingtaine de centimes en plus de consigne, l’achat de la bouteille en plastique aux consommateurs qui se verront alors remboursées cette somme lorsqu’ils rendront les bouteilles dans un distributeur dédié. « Les seuls bénéficiaires seraient les producteurs, pour un gain estimé de plusieurs centaines de millions d’euros par an » pour toutes les bouteilles qui ne seront pas forcément rapportées pestent les élus.
Ils dénoncent aussi le surcoût d’installation de ces automates pour les collectivités qui est estimé entre 750 millions et un milliard d’euros. En conférence de presse, le maire socialiste de Bourg-en-Bresse, Jean-François Debat a ainsi jugé que « les collectivités dépenseraient beaucoup, pour un gain environnemental peu intéressant ».
En effet, les chiffres montrent que les bouteilles plastiques « font partie des déchets plastiques les mieux valorisés, avec un taux de recyclage de 70 % contre 23 % pour les autres déchets plastiques » a rappelé Jean-François Vigier, le maire UDI de Bures-sur-Yvette dans l’Essonne (les objectifs européens de taux de collecte des bouteilles plastiques sont fixés à 90 % à l’horizon 2025). Les bouteilles plastiques, c’est « 350.000 tonnes, soit moins de 1 % des déchets ménagers, qui totalisent 39 millions de tonnes » a-t-il ensuite précisé. Ainsi, pour les élus locaux, l’exécutif devrait se pencher un peu plus sur les autres emballages plastiques ou les « milliers de produits de grande consommation qui n’ont aucune solution de collecte sélective et de recyclage » avant de vouloir absolument régenter le recyclage des bouteilles en plastique. « La priorité du gouvernement, c’est de dire qu’il faut améliorer le recyclage des bouteilles en plastique. Mais pourquoi ? Parce que derrière, il y a un énorme lobby des producteurs de bouteilles en plastique eux-mêmes, qui ont imaginé ce système pour en tirer un bénéfice » déclare un Jean-François Debat très remonté. Une « privatisation » qui a dû mal à passer. « En subtilisant [aux centres de tri installés par les communes] le seul gisement ayant de la valeur mais en laissant au service public les emballages sans valeur, les industriels de la boissons risquent de menacer l’équilibre économique de ce service public de salubrité » et « provoquer une augmentation substantielle de la taxe ou redevance d’enlèvement des ordures ménagères » alertent-ils.
Ne se contentant pas de critiquer cette « arnaque intellectuelle » qui ne ferait que déstabiliser le système public de collecte des déchets sans améliorer la collecte du plastique, les élus font 14 propositions « pour un service public de gestion des déchets ambitieux et efficace ». Pour respecter l’objectif français de division par deux des bouteilles plastiques d’ici 2030, ils suggèrent notamment de faire évoluer les pratiques de consommation (promotion de la consommation d’eau du robinet, création d’une offre de boissons en vrac sans emballages, mise en place de dispositifs incitatifs au redéploiement de bouteilles lavables et réemployables/réutilisables consignées…). Ils proposent aussi d’augmenter la fréquence des collectes et la taille des bacs dans les habitations lorsque cela est possible et densifier les points d’apport volontaires. ■