Print this page

Vols habités : l’Europe doit prendre son envol

Un groupe consultatif indépendant présente à l’ESA un rapport sur la révolution spatiale européenne et recommande d’investir dans les vols habités.

“Soyons audacieux, plaçons l’Europe à l’avant-garde de l’exploration spatiale. Si nous ne le faisons pas, nous prendrons du retard et deviendrons dépendants des autres” a déclaré Anders Fogh Rasmussen, ancien Premier ministre danois, membre du « Groupe consultatif de haut niveau » (HLAG, High Level Advisory Group) a l’occasion de la remise à l’ESA en mars dernier d’un rapport indépendant sur l’état de l’exploration spatiale européenne. Dans ce rapport intitulé « La révolution de l’espace : la mission de l’Europe en matière d’exploration spatiale », le HLAG y affirme que l’exploration humaine de l’espace connaît une révolution que l’Europe ne peut se permettre de manquer - « L’espace est au seuil d’une révolution comparable à celle d’internet il y a vingt ans » -. Aussi, « les pays et les régions qui ne s’assureront pas un accès indépendant à l’espace et une utilisation autonome de celui-ci deviendront stratégiquement dépendants et seront économiquement privés d’une partie importante de cette chaîne de valeur. L’Europe doit viser à s’emparer d’un tiers de ce futur marché ». Pour cela, elle « doit augmenter de manière significative ses investissements dans l’exploration humaine et développer ses propres capacités en matière de vols habités » poursuit le HLAG. Le rapport suggère qu’un investissement plus important dans l’exploration spatiale permettra d’attirer les meilleurs talents, de maintenir l’excellence européenne et d’unir l’Europe autour d’une grande vision. Le rapport affirme encore « qu’une plus grande autonomie dans ce domaine fera de l’Europe un partenaire plus solide et plus attrayant en vue d’une coopération internationale ».

Au final, le HLAG appelle à un grand chambardement (ambition, moyens financiers et politique industrielle). L’ESA doit « agir de manière visionnaire » « différemment » et « maintenant » dans le domaine de l’exploration spatiale insistent les membres de ce groupe indépendant.

Depuis 1992 et l’arrêt du programme Hermès, l’Europe a renoncé aux vols habités : elle dépend aujourd’hui de sa collaboration avec les Américains et les Russes. Or depuis la guerre en Ukraine, l’Europe montre son extrême dépendance pour les vols habités et notamment de SpaceX pour l’envoi dans l’espace de ses astronautes.

« L’Europe est un leader technologique dans de nombreux domaines, des transports terrestres à la production d’énergie propre en passant par la fabrication de puces et l’économie circulaire. Nous sommes également en tête dans le domaine spatial, sauf pour les vols habités, pour lesquels nous nous appuyons sur des partenaires internationaux. Nous ne devons pas laisser l’accès à l’espace échapper à l’expertise et au leadership européens. Ce rapport sur « La révolution de l’espace » est un signal d’alarme pour les dirigeants européens, qui doivent agir maintenant afin de ne pas manquer cette opportunité. L’ESA possède l’expertise et l’ambition nécessaires. Avec le soutien de ses partenaires industriels novateurs, l’ESA peut y parvenir » a répondu Josef Aschbacher, directeur général de l’ESA.

A la suite de la remise du rapport, un groupe de travail du Conseil de l’ESA a d’ailleurs été mis en place pour examiner les recommandations du rapport et pour préparer le prochain sommet de l’espace, qui se tiendra à Séville, en Espagne, le 6 novembre 2023. 


Les 12 membres du HLAG :
Le HLAG comprend des dirigeants issus du secteur industriel, du milieu gouvernemental, du monde universitaire et de la société civile. Il a été créé à l’été 2022 à la demande du Conseil de l’ESA.
• Stefania Giannini, ancienne ministre italienne de l’Éducation, de l’Université et de la Recherche
• Erling Kagge, explorateur et première personne à avoir atteint à pied les trois « pôles » (le pôle Nord, le pôle Sud et le mont Everest) ;
• Mariana Mazzucato, professeure à l’University College de Londres, où elle dirige l’Institute for Innovation and Public Purpose, et auteure de Mission Economy ;
• Maria Theresia Niss, membre du Conseil national autrichien et présidente de la Conférence interparlementaire européenne sur l’espace ;
• Cédric O, ancien secrétaire d’État français au numérique ;
• Chris Rapley, professeur de sciences du climat à l’University College de Londres et président du Comité européen des sciences spatiales de la Fondation européenne de la science ;
• Anders Fogh Rasmussen, ancien secrétaire général de l’OTAN et ancien premier ministre danois
• Anna Rathsman, présidente du Conseil de l’ESA et directrice générale de l’Agence spatiale suédoise ;
• Tomasz Rożek, communicateur scientifique ;
• François Schuiten, dessinateur de bandes dessinées à succès ;
• Christoph Schweizer, directeur général du Boston Consulting Group ;
• Saadia Zahidi, directrice générale du Forum économique mondial.

907 K2_VIEWS