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Élections agricoles : la percée des “Bonnets jaunes” de la Coordination rurale

Les listes FNSEA et Jeunes agriculteurs sont en tête dans plus de 80 % des départements mais la Coordination rurale fait une percée historique et prend la direction de 14 chambres d’agriculture contre trois jusqu’à présent.

Un basculement historique. Les élections agricoles qui se sont tenues tout le mois de janvier ont donné des résultats à hauteur de la crise et de la colère qui secouent le monde agricole. Contraint et forcé, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau n’a pu que prendre acte du « recul des listes FNSEA-JA » tout en prenant soin toutefois de préciser que les listes FNSEA-JA avaient remporté « plus de 80 % des chambres d’agriculture départementales » leur permettant de rester « la première force syndicale du monde agricole ». Mais ce vote « nous oblige à la lucidité quant aux enseignements de ce scrutin [… ] indéniablement, une colère s’est exprimée. Ce vote de la colère a prospéré sur les promesses non tenues depuis près d’un an par les pouvoirs publics, alimentant ainsi un sentiment d’abandon » a déploré Arnaud Rousseau. La FNSEA-JA pouvait jusque-là compter sur la présidence de 97 chambres sur 102. Le coup porté est rude. Les « bonnets jaunes » qui ont progressé dans tous les départements ont pour leur part célébré « une victoire historique ». « Les agriculteurs ont dit stop à la cogestion, responsable de la disparition d’un million de vaches et de 150 000 fermes en dix ans » s’est félicitée la Coordination rurale.

Depuis le début de la crise agricole, le syndicat n’a eu de cesse de monter des opérations coup de poing – blocages de permanence de parlementaires, de MSA, déversements de légumes et / ou fumier, bâchage de radars… montrant un activisme certain face à une FNSA plus policée et politique. Faut croire que le discours antisystème, antinormes a porté ses fruits. Reste que la Coordination rurale est accusée par ses détracteurs d’être (trop) proche des milieux politiques de la droite extrême, ce dont se défend la CR. Lors du dernier salon de l’agriculture, Emmanuel Macron parlait d’ailleurs des militants de la CR comme de « gens qui sont là avec un projet politique qui est de servir le Rassemblement national ». « Il existe une probabilité plus forte de sympathie avec le RN chez les syndiqués Coordination rurale que dans le reste de la cohorte » relevait à son tour le sociologue François Purseigle à la suite de son enquête Groupe Réussir-Cevipof menée auprès de 1500 agriculteurs.

Le basculement des chambres d’agriculture passées au jaune sont le reflet de la crise. Cher, Loir-et-Cher, Indre-et-Loire, Vienne, Charente, Charente-Maritime, Dordogne, Gironde, Lot-et-Garonne, Gers, Tarn… ces départements sont souvent en situation précaire après des récoltes désastreuses, des problèmes d’accès à l’eau, des élevages en difficulté. Ici, la contestation l’a emporté et le vote a été un exutoire de cette colère.

Quoiqu’il en soit « l’heure n’est pas au triomphalisme, a souligné Véronique le Floc’h, la patronne de la Coordination rurale. Il y a tant de travail à faire et une situation tellement grave pour l’agriculture française »

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