Membre de la Commission Développement Durable et Aménagement du Territoire, j’ai l’honneur d’être un des rapporteurs de ce projet de loi, avec mes collègues Aude Luquet, Eric Bothorel et Henri Alfandari. Je suis chargé spécifiquement des articles sur la simplification des procédures, la planification de l’éolien en mer et de nombreuses dispositions portant sur diverses catégories d’énergies renouvelables.
Accélérer les énergies renouvelables est plus que jamais nécessaire dans le contexte actuel. Nous faisons face à des crises écologique, énergétique, et géopolitique qui ont pour dénominateur commun notre dépendance aux énergies fossiles. En France, notre consommation d’énergie finale dépend à 65 % d’énergies fossiles produites par d’autres pays. Se libérer de ces énergies mortifères doit être notre combat numéro un, à la fois pour respecter l’Accord de Paris et demeurer dans les limites d’un monde habitable, mais aussi pour restaurer notre souveraineté énergétique.
En France, nous avons deux sources d’énergie décarbonée à notre disposition : le nucléaire et les énergies renouvelables. Les crises que nous traversons aujourd’hui démontrent l’intérêt vital de diversifier le mix énergétique pour consolider notre indépendance. C’est parce qu’elles reposent sur des ressources et des rythmes de déploiement différents que nous devons combiner ces énergies décarbonées et assurer ainsi un avenir énergétique serein à notre pays. Tandis que la relance du nucléaire fera l’objet d’un texte spécifique débattu au Parlement début 2023, je salue l’initiative du Gouvernement de présenter dès maintenant un projet de loi pour accélérer la production d’énergies renouvelables.
En effet, la France est en retard sur les objectifs de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE). Le pays doit atteindre 40 % d’énergies renouvelables dans son mix énergétique en 2030, contre 19 % actuellement. Pour cela, le projet de loi sur les énergies renouvelables (EnR) s’articule autour de 4 grands axes : renforcer la planification territoriale du développement des EnR, rationaliser et simplifier les procédures administratives, libérer du foncier en ciblant en priorité les zones déjà artificialisées, et partager la valeur directement avec les communes et les habitants concernés.
Doubler notre part d’énergies renouvelables d’ici 2030 nous oblige premièrement à organiser le développement rythmé et soutenable de ces énergies. Mais cette planification ne peut qu’être collective pour être réussie, et la participation active des collectivités territoriales joue un rôle-clé. L’examen en commission à l’Assemblée nationale est venu confirmer cette méthode indispensable qu’est la planification. Les députés ont apporté des modifications au dispositif initial afin de le rendre plus cohérent et lisible. L’approche ascendante introduite par le Sénat a été préservée, pour garantir une planification choisie et pilotée par les élus locaux tout en s’alignant sur les les objectifs nationaux. Des zones prioritaires doivent donc être définies, à l’échelle des territoires, par les collectivités locales elles-mêmes et être en cohérence avec les objectifs régionaux au titre de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie.
Au-delà de l’enjeu de planification, l’enjeu majeur de ce projet de loi réside dans la simplification et la rationalisation des procédures pour tout type d’énergies renouvelables. Actuellement, il faut compter 5 ans de procédures pour un parc solaire, alors même qu’il ne nécessite que quelques mois de construction, et plus d’une décennie pour un parc éolien en mer. Le temps moyen de déploiement des projets d’énergies renouvelables est deux fois plus long que chez la plupart des autres Etats européens. Le Titre Ier, au sein duquel sont rassemblées ces mesures systémiques, entend adapter les procédures actuelles pour rendre plus efficiente l’instruction des projets, améliorer la concertation en amont ou encore, apporter des sécurités juridiques. S’agissant des rationalisations administratives, l’enjeu n’est pas de reculer sur la participation du public ou la protection de la biodiversité, qui sont des principes protégés par la Constitution. Mais en mutualisant certaines consultations et en rationalisant les procédures nous pourrons aller aussi vite que tous nos voisins européens et rattraper sans précipitation notre retard. Soucieux du renforcement de la concertation et de la participation locales, je suis aussi particulièrement attaché à la création d’un référent préfectoral à l’instruction des projets d’EnR, tel qu’il a été introduit par le Sénat.
Ce projet de loi est également l’opportunité d’aborder le déploiement de l’éolien en mer, qui est une énergie renouvelable d’avenir à fort potentiel. La France possède le deuxième gisement européen en vent après le Royaume-Uni, pourtant seul 0,48 GW d’éolien en mer est raccordé contre 12 GW pour nos voisins outre-Manche. L’objectif de ce texte est de mettre un véritable coup d’accélérateur à la planification de la filière, en s’appuyant sur les documents stratégiques de façade comme outil de concertation, de cartographie et de déploiement. Le projet de loi vise également à adapter nos normes juridiques pour favoriser l’implantation d’éoliennes en mer, notamment au niveau de la zone économique exclusive (au-delà de 12 milles des côtes) ou à cheval sur le Domaine Public Maritime.
Le Sénat a ajouté un titre III bis pour des mesures portant sur diverses énergies renouvelables. En commission, les députés l’ont enrichi sur différents volets. Si le solaire, l’éolien en mer et l’éolien terrestre sont des énergies à grand potentiel, je suis heureux que nous ayons inclus dans le texte diverses dispositions sur la géothermie, la valorisation énergétique à partir de combustibles solides de récupération (CSR), les énergies marines renouvelables ou, encore, préservé le droit existant sur la petite hydroélectricité. La commission a également adopté une disposition visant à inscrire dans les appels d’offres des critères de recyclabilité des parcs éoliens.
Au-delà de l’enjeu d’accélération et de rationalisation, ce projet de loi doit naturellement respecter certains principes, au premier rang desquels se trouve la protection de la biodiversité. Car si le changement climatique est l’une des premières causes de l’érosion de la biodiversité, cette même érosion nourrit l’emballement climatique. Il est donc primordial d’avoir une approche très cohérente des futurs projets qui sortiront de terre.
L’examen en séance publique se tiendra la semaine du 5 décembre et devra être l’occasion de poursuivre le dialogue avec l’ensemble des groupes pour continuer à enrichir le texte et tenter de rétablir certaines dispositions écartées au cours de l’examen. La priorité sera de préserver l’objectif de ce projet de loi : accélérer le déploiement des énergies renouvelables pour gagner en souveraineté énergétique et lutter contre le dérèglement climatique en réduisant massivement nos émissions ! ■