Si depuis l’après-guerre, la consommation de viande n’a cessé d’augmenter, portée en partie par la croissance démographique, ces dernières années, la tendance est plutôt à la baisse. En 2023, la consommation de viande a atteint 5,7 millions de tonnes équivalent carcasse (tec), soit une baisse de 2,3 % par rapport à 2018. Sur cinq ans, cette diminution est principalement due au repli de la consommation de viande porcine (- 5,6 %), de viande bovine (- 6,9 %), et de viande ovine (- 8,1 %), bien que la hausse de la consommation de volaille (+ 6,1 %) ait atténué cette baisse. Après avoir atteint un pic de 93,6 kgec/hab en 1998, la consommation de viande en 2023 s’est établie à 83,3 kilogrammes équivalent carcasse (kgec) par habitant. Pour leur consommation à domicile, les Français ont acheté moins de viande de boucherie tout en se portant plus vers la volaille dont la part est passée de 25,1 % en 2003 à 29,1 % en 2013, pour atteindre 34,8 % en 2023. « Cependant, poursuit FranceAgriMer, la viande de porc, y compris sous forme transformée, conserve sa place de viande la plus consommée en France, malgré une baisse constatée depuis près de 20 ans (- 15 % entre 2003 et 2023) ». Le porc bénéficie en effet d’un prix comparativement moins élevé que les autres viandes de boucherie, ainsi que d’une importante diversité de produits, ce qui peut expliquer son maintien en tant que première viande consommée en France (en 2023, 30,5 kgec/hab). Quant à la consommation individuelle de viande de volailles devenue au fil du temps la deuxième viande la plus consommée en France, « elle surpasse le volume de viande bovine depuis 2013 et se rapproche fortement de celui de la viande porcine. La consommation individuelle de volaille, qui était de 17,2 kgec/hab en 1983, puis de 21,9 kgec/hab en 2003, a atteint 28,9 kgec/hab en 2023 (+32 % en 20 ans) ». « Cette hausse s’explique par un prix relativement bas par rapport aux autres viandes, ainsi que par une innovation constante répondant aux nouvelles attentes des consommateurs (praticité, diversité de produits, goût consensuel, etc.) » juge FranceAgriMer.
Enfin, c’est la consommation de viande bovine qui a connu ces dernières années, la plus forte tendance baissière même si cela reste très relatif. En 20 ans, la consommation individuelle a diminué de 3,9 kgec/hab (- 16 %), atteignant 21,4 kgec/hab en 2023. Une tendance qui peut être liée en partie au prix relativement élevé de la viande bovine.
Les achats de produits carnés (hors œufs) par les ménages métropolitains pour leur consommation à domicile ont été évalués à environ 2,0 millions de tonnes en 2023 par le panel consommateurs Kantar Worldpanel. Les dépenses correspondantes sont estimées à 25,0 Mdse, avec un prix moyen d’achat de 12,30 e/kg, en augmentation de 8,2 % par rapport à 2022.
En 2023, les Français ont acheté pour leur consommation à domicile 684 000 tonnes de viandes de boucherie fraîches (élaborés et abats compris), 575 923 tonnes de viandes de volaille et de lapin et 699 000 tonnes de charcuterie (31 % de jambon cuit et cru et 13 % de lardons, poitrine et bacon).
A la fin de son rapport, FranceAgriMer s’interroge sur la montée en puissance ou pas des légumineuses (lentilles, fèves, pois, etc.) comme alternatives aux protéines animales (1). Cette tenance s’expliquerait par une évolution des mentalités sur le rapport homme/animal, des préoccupations environnementales et nutritionnelles, la recherche d’une cuisine d’assemblage et une réduction des temps de préparation, une évolution des goûts et des plats, des contraintes économiques, etc. Pour autant, l’examen des données de FranceAgriMer et ses propres conclusions ne montrent pas de « stratégie franche » de report entre les achats de protéines animales et de protéines végétales pour une consommation au domicile. Bien au contraire. Il apparaît en effet que « les ménages qui achètent, pour leur consommation à domicile, plus de viande fraîche que la moyenne française sont également ceux qui achètent davantage de protéines d’origine végétale ». « L’opposition est très marquée en fonction de l’âge des ménages. En effet, les ménages les plus âgés (ménages de plus de 50 ans) et dans une moindre mesure les ménages les plus aisés, sont sur-consommateurs de viande de boucherie fraîche (bœuf, porc, veau, etc.), hors élaborés (hachés, saucisserie, etc.), et sont également sur-consommateurs de légumineuses par rapport à la moyenne, et inversement » conclut FranceAgriMer… ■
*Consommation de produits carnés et d’oeufs en 2023 édition août 2024
1. D’après un travail réalisé par l’IFOP en 2019 à partir d’un échantillon de 15 000 personnes, un Français sur quatre se considérait comme « flexitarien » Ils étaient en revanche très peu à s’identifier aux régimes bannissant totalement la viande.
“Steak végétal” : l’Europe contredit la France
La Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé le 4 octobre dernier que la France n’a pas le droit d’interdire l’utilisation du terme « steak végétal » pour désigner des produits végétaux vendus comme alternatives à la viande. « Tant qu’un Etat n’a pas adopté la dénomination légale spécifique à une denrée, il ne peut pas interdire l’utilisation de termes « usuels » qui désignent les produits de consommation » précise la Cour. Une décision qui met (provisoirement ?) fin à un long bras de fer entre les fabricants d’alternatives végétales à la viande et la filière viande. En juin 2022, la France prenait deux décrets interdisant l’utilisation de plusieurs termes comme « jambon », « steak » ou « saucisse », « bacon » associés à des produits végétaux. Pour le lobby de la filière viande à la manœuvre, l’objectif était alors d’éviter toute confusion pour les consommateurs pouvant nuire à leurs activités commerciales. Les décrets étaient immédiatement dénoncés par plusieurs associations de défense des alternatives végétales. Saisi en référé, le Conseil d’Etat prenait alors la décision de suspendre les décrets, estimant que la décision du gouvernement « porterait une atteinte grave et immédiate aux intérêts des entreprises » de produits végétaux, les obligeant notamment à revoir leur packaging. La décision de la Cour européenne a été saluée par les acteurs du secteur des produits végétariens et végétaliens. « Il revient maintenant au Conseil d’Etat français de rendre une décision définitive » a indiqué un porte-parole de la Commission européenne. Toutefois, « si une autorité nationale estime que les modalités concrètes de vente ou de promotion d’une denrée alimentaire induisent en erreur le consommateur, elle pourra poursuivre l’exploitant » précise la Cour.