Le réchauffement climatique et les aléas naturels (sécheresse, inondations, submersions marines et tempêtes) qui en découlent vont alourdir la facture des assureurs dans les années à venir. C'est le sombre constat dressé par l'Association française des assureurs (Afa) dans son étude sur le changement climatique et assurance*. Les dégâts causés par les catastrophes naturelles dans les vingt-six prochaines années pourraient s'élever à 92 milliards d'euros. Pour arriver à ce chiffre, l'étude a fait le choix de coupler les projections climatiques de la communauté scientifique (indicateurs climatiques : vitesse maximale du vent quotidien, précipitation maximale quotidienne, cumul de précipitation quotidienne…) aux projections socio-économiques (scénario d'évolution des richesses et de leur exposition: nombre et taille des logements, nombre et taille des entreprises, évolution des concentrations géographiques...).
Elle a également fait le choix de prendre une période de référence temporelle qui s'échelonne de 1988 à 2013 (pour la phase de « retour sur le passé ») et de 2014 à 2039 (pour la phase de « projection »). « Vingt-six années constituent un horizon court à l'échelle du climat » mais « c'est le choix qui a néanmoins été fait car l'analyse d'un impact chiffré implique que la projection climatique soit couplée avec celle des enjeux socio-économiques. Pour projeter ces enjeux, 26 ans est un horizon long et même une limite pour une projection crédible. Cette durée constitue donc un compromis de cohérence » justifie l'Afa.
Une facture de 48 milliards d'euros
Mais ce qu'il faut surtout retenir de cette étude c'est bien la hausse considérable du coût des aléas naturels) à l'horizon 2040. Entre 1988 et 2013, les sécheresses, inondations et autres submersions marines et tempêtes ont coûté aux assureurs 48 milliards d'euros, soit une facture moyenne de 1,86 milliards d'euros par an. Sur la période 2014 -2029, les catastrophes naturelles vont coûter, selon les prévisions de l'Afa 92 milliards d'euros. , soit une hausse de 90% par rapport au montant des dégâts cumulés de la période de référence précédente.
Des insuffisances dans l'application concrète des politiques de prévention
Les assureurs expliquent ce surcoût par l'enrichissement global de la France qui, densifiant son territoire en logements, entreprises et biens de collectivités, « conduira naturellement à une augmentation des conséquences d'un événement climatique ». Ce facteur « enrichissement » représente 43 % du surcoût estimé, soit 19 milliards d'euros. Autre facteur explicatif de ce surcoût: le changement climatique d'ici à 2040, « et notamment les effets d'une hausse des températures » dont l'impact est estimé à 13 milliards d'euros. Enfin, la répartition géographique des richesses sur le territoire métropolitain et la variation naturelle du climat auront quant à elles des conséquences évaluées respectivement à 8 et 4 milliards d'euros.
L'étude de l'AFA montre aussi que « la hiérarchie des périls va évoluer ». Ainsi les phénomènes de retrait-gonflement des sous-sols liés à la sécheresse, tout comme les phénomènes de submersion marine, sont les périls qui présentent les plus fortes évolutions prévisibles en matière de fréquence et d'intensité. Le coût de la sécheresse passerait alors de 8 Mds€ sur la période 1988-2013 à 21 Mds€ sur la période 2013-2039, « ce qui reviendrait, à l'horizon 2040, à quasiment tripler la charge moyenne annuelle aujourd'hui constatée » pointent les assureurs. Si le phénomène de la submersion marine est un péril émergent pour la France – on se souvient des conséquences de la tempête Xynthia en 2010 -, ce type d'événement est largement susceptible de se répéter à l'horizon 2040 expliquent les observateurs du climat. A l'horizon 2040, la submersion marine représente à elle seule 18 % du surcoût des inondations et vient alourdir la facture des inondations estimée à34 Mds€ (16 Mds entre 2008-2014) de + 4 Mds€. Sur les 25 dernières années, les tempêtes ont représenté le péril le plus coûteux pour les assureurs qui constatent que « lorsqu'elles surviennent, elles se déploient sur une grande partie de notre territoire et entraînent un très grand nombre de sinistres ». Sur la période 2013 et 2039, le coût est estimé à 33 Mds€.
« Malgré une incontestable mobilisation des pouvoirs publics pour améliorer la cohérence et l'efficacité des moyens de prévention contre les aléas naturels, les assureurs observent sur le terrain des insuffisances dans l'application concrète des politiques de prévention » souligne l'Afa qui dans un Livre blanc fait le constat de « dysfonctionnements majeurs ». Ils font alors 23 propositions d'améliorations destinées « à intensifier les politiques publiques de prévention et de protection » leur financement « plus cohérent et efficace ». Ils prônent notamment une « réforme structurelle » du fonds de prévention des risques naturels majeurs plus connus sous le nom de Fonds Barnier « tant du point de vue de sa gouvernance, de ses missions, de son contrôle que des maîtrises des dépenses ». ■
* Risques Climatiques : quel impact sur l'assurance contre les aléas naturels à l'horizon 2040 ?
La « Taxe terrorisme »
Sur chaque contrat d'assurance, une taxe est prélevée afin d'alimenter le fonds d'indemnisation des victimes des actes de terrorisme et autres infractions (FGTI), créée en 1986. Au lendemain des attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Casher, la contribution avait été augmentée de 1 euro passant de 3,30 à 4,30 euros. Cette augmentation a permis au fonds de prévoyance de collecter 86 millions d'euros supplémentaires. Les attentats de novembre qui ont fait 130 morts et 352 blessés ont augmenté la demande en remboursement. Demande qui a pu être rapidement satisfaite. Il n'a fallu que sept jours pour que le FGTI débloque les fonds pour les premiers remboursements. Mais après ces événements tragiques, beaucoup se sont inquiétés de la solvabilité du fonds. Michel Sapin a tenu à les rassurer en indiquant, lors d'une visite dans les locaux du FGTI, le 20 novembre dernier, que l'Etat « n'aura aucune difficulté à faire face » ; les réserves du fonds s'élevant à 1,2 milliard d'euros.
Malgré tout, rien n'interdit, dans un avenir proche ou lointain, son augmentation. L'article L422-1 du Code des assurances qui détaille les conditions financières du fonds a été remanié par la loi du 15 août 2014. Il est alors prévu que son augmentation puisse aller jusqu'à 6,50 euros, par simple décret ministériel. Contacté par le Figaro, les services du FGTI admettent que cette augmentation est une possibilité « souhaitable » même si aujourd'hui il n'y a aucune inquiétude à avoir pour les victimes du 13 novembre assurent-ils.