En revanche, notre politique du logement est encore trop pensée pour les Français d’hier, et pas assez pour ceux d’aujourd’hui. Résultat : elle n’est pas efficace. C’est pourquoi elle doit évoluer.
La Stratégie Logement du Gouvernement, présentée le 20 septembre dernier, a été précédée d’une phase de concertation ouverte à tous les acteurs de ce secteur, qui ont répondu par plus de 2 500 contributions pour l’enrichir.
Si nous parlons d’une « Stratégie logement », c’est bien parce que notre projet est global. Il contient des volets législatifs, financiers, règlementaires et contractuels. Un projet de loi sera ainsi présenté au Parlement en ce sens au 1er semestre 2018.
Le logement, c’est la vie quotidienne des Français. Les membres de la représentation nationale le savent bien. Nous comptons sur le débat parlementaire pour compléter et approfondir ce qui doit l’être lors de notre futur débat sur le projet de loi logement.
Notre constat est simple. Malgré l’ampleur des dépenses publiques en matière de logement, près de 40 milliards d’euros chaque année, de nombreux Français ont encore beaucoup de difficultés à louer ou acheter un logement, à le chauffer, à en changer lorsque la composition familiale évolue.
Cela est particulièrement vraie en zone tendue (Ile-de-France, Provence Alpes Côte-d’Azur..), avec une offre insuffisante au regard des besoins. Dans nos territoires ruraux, nous assistons à une progressive désertification des villes, des commerces qui ferment leurs portes, des habitants dont le temps de trajet pour rejoindre leur lieu de travail s’accroît. C’est cette France a deux vitesses qu’ils nous faut rassembler.
Penser une politique du logement, c’est aussi construire une politique d’aménagement du territoire, dans les territoires ruraux, les métropoles, les villes moyennes ou encore dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. C’est donc une politique globale d’intervention des politiques publiques qu’il nous faut relancer. A ce titre, notre Ministère est une chance : la Cohésion des Territoires, avec son intitulé ambitieux, conduit à repenser globalement les problématiques du logement.
Nous avons voulu élaborer cette stratégie en prenant en compte les réalités du terrain, les blocages et autres difficultés rencontrés par les particuliers, les professionnels et les collectivités territoriales.
Notre premier pilier consiste donc à construire plus, mieux et moins cher.
Le foncier, même en zone tendue, n’est pas un bien rare et il convient de le libérer. Or, aujourd’hui la fiscalité foncière encourage sa rétention. Elle sera donc revue pour accélérer la construction, en permettant aux propriétaires de bénéficier d’un taux réduit d’imposition sur les plus-values lors de la vente de terrains à construire, selon la nature de l’opération.
Pour les particuliers, dans les zones tendues, le taux réduit exceptionnel sera appliqué sur les plus-values résultant de la cession de terrains à bâtir ou de terrains bâtis, en cas de promesse de vente conclue avant fin 2020 en vue de la construction de logements neufs. Cet abattement sera de 100 % pour les cessions réalisées en vue de construire du logement social, de 85 % pour les cessions en vue de réaliser du logement intermédiaire, et de 70 % en vue de réaliser du logement libre, sous condition de densification.
La construction a besoin de terrains mais aussi de droits à construire. Cela passe par le développement de l’urbanisme de projets que nous allons faciliter avec la création des PPA (projet partenariaux d’aménagement) L’idée est de remettre l’urbanisme de projet dans le débat politique local et de privilégier la contractualisation avec les collectivités.
Autre blocage : aujourd’hui, la règlementation dans le bâtiment repose sur une logique de prescriptions de moyens qui sclérosent l’innovation. Pourtant, les TPE et PME innovent et leurs solutions ne sont pas assez exploitées pour le bâtiment.
Nous défendons donc un objectif de résultats plutôt qu’une prescription de moyens. L’État ne doit plus dire aux professionnels tout ce qu’ils doivent faire, mais fixer des objectifs à atteindre et faire confiance à ceux qui construisent et rénovent. Simplifier les normes et procédures existantes pour faire baisser les coûts de la construction, par exemple les normes sismiques lorsque qu’elles sont trop sévères dans des zones à faible risque. Sans jamais mettre en péril la sécurité des Français, bien évidemment.
La lutte contre les recours abusifs s’inscrit dans cette démarche. 30 000 logements sont aujourd’hui bloqués par des recours. Le délai moyen de traitement du contentieux en première instance est de deux ans. Au regard des attentes des Français, ce n’est pas acceptable. Notre objectif est de parvenir à raccourcir considérablement la période d’instruction du recours.
Concernant le PINEL, comme annoncé, nous souhaitons le prolonger pour 4 ans dans les zones tendues, en zones A, Abis et B1 ; en zone B2 nous instaurons un dispositif de transition, à savoir : les permis de construire délivrés avant le 31 décembre 2017 et objets d’un acte authentique avant le 31 décembre 2018 resteront éligibles.
Concernant le PTZ, nous le prolongeons dans le neuf pour 4 ans dans les zones Abis, A et B1 et pour 2 ans en zones B2 et C ; et dans l’ancien pour 4 ans en zones B2 et C. Il s’agit pour nous de donner de la visibilité et de la stabilité aux acteurs de la construction.
Notre deuxième pilier vise à répondre aux besoins de chacun.
Notre priorité absolue est d’aider les jeunes dans l’accès au logement, car c’est un facteur d’émancipation important. Notre plan, préparé avec la Ministre Frédérique VIDAL, propose la construction de 80 000 logements sur le quinquennat, dont 60 000 logements étudiants et 20 000 pour les jeunes travailleurs.
Nous pensons aussi à celles et ceux dont le stage, la formation, l’emploi, conduit à avoir besoin d’un logement pour une courte période. C’est le sens de notre bail mobilité, d’une durée de 1 à 10 mois. La location sera facilitée et la qualité des relations propriétaires-locataires améliorée grâce à l’élargissement à l’ensemble des publics étudiants, du dispositif de garantie « Visale » développé en partenariat avec Action Logement. Concrètement, cela veut dire que les publics éligibles n’auront plus de caution locative ni de garantie à présenter : Action logement le fera pour eux. C’est un progrès majeur pour l’ensemble des publics fragiles que nous voulons faire accéder au logement durable.
La feuille de route du gouvernement pour le logement social est également ambitieuse. Nous construirons plus de logements sociaux, en appliquant strictement la loi SRU. Pour les locataires, nous leur permettrons d’acheter leur logement à des prix attractifs, et nous favoriserons la mobilité au sein du parc social afin que chaque logement soit adapté aux besoins réels des locataires. Il faut aujourd’hui deux à huit ans pour bénéficier d’un logement social en Île-de-France. S’il existe 4,5 millions de logements locatifs sociaux, seulement 9,7 % de ce parc social est mis en location chaque année. Nous proposons donc un examen périodique tous les 6 ans pour évaluer si le logement est adapté à la situation des ménages et, le cas échéant, proposer un logement, dans le respect du droit au maintien dans le parc social.
Le plan logement d’abord, annoncé par le Président de la République, transformera en profondeur le dispositif d’hébergement d’urgence en accompagnant en priorité les publics les plus précaires vers le logement adapté. Il repose notamment sur l’objectif de création de 40 000 places en intermédiation locative et de 10 000 places supplémentaires en pension de famille dans les 5 prochaines années.
Notre troisième pilier a pour ambition d’améliorer le cadre de vie des Français et d’incarner la cohésion des territoires.
Dans notre pays, les fractures territoriales ne sont pas seulement un sentiment mais une réalité. Elles contribuent à accentuer les discriminations et le sentiment de relégation des habitants des territoires les plus touchés.
Nous voulons répondre à cet enjeu par trois engagements : avec le déploiement du bon débit pour tous d’ici 2020 et du très haut débit sur tout le territoire d’ici 2022 ; avec le plan de rénovation du centre des villes moyennes, pour requalifier des immeubles dans les centres anciens et remettre sur le marché une offre de logements adaptée aux attentes actuelles, à hauteur de 1,5 Mds€ tous les 5 ans ; et avec une mobilisation nationale et interministérielle de grande ampleur à destination des quartiers prioritaires, dits « politique de la ville ».
De façon générale, cette mobilisation passe aussi par un renouvellement de la méthode de dialogue avec les acteurs de terrain, collectivités et associations. Nous rappelons que les moyens aux quartiers prioritaires seront reconduits en 2018 avec un maintien de la dotation politique de la ville à 150 M€, une augmentation de la DSU de 90 M€, une sanctuarisation des crédits du programme politique de la ville à hauteur de 430,4 M€.
C’est bien par la mobilisation de toutes et tous que nous réussirons à transformer la politique du logement. ■