Celle-ci se concrétisera en deux moments : l’une en cours de discussion et de vote dans le budget 2018 ; l’autre dans un projet de loi qui devrait voir le jour avant la fin de l’année 2017 et qui devrait être appliqué dans le courant de l’année 2018. Mais déjà cet été le logement est devenu un sujet sensible. Retour sur un calendrier et sur la stratégie de mise en œuvre du gouvernement.
Un été mouvementé pour les aides personnalisées au logement (APL)
En juillet, pour parvenir à boucler le budget 2017, le gouvernement a dû faire face à une opération comptable peu simple à résoudre : un trou dans les comptes 2017 dû à des aides au logement versées supérieures de 140 millions d’euros aux prévisions de la LFI. Pour la résoudre, Bercy a décidé en juillet de baisser de 5 euros le montant des APL. Un mini coup de rabot qui a été rendu effectif le 1er octobre dernier pour 13 millions de personnes dont 800 000 étudiants. Un décret et deux arrêtés publiés au journal officiel du 29 septembre ont inscrit cette baisse des APL dans les codes de la construction et de l’habitation et de la Sécurité sociale. En parallèle, Emmanuel Macron a demandé aux propriétaires, sans que cela soit contraignant, de baisser leurs loyers de cinq euros.
Ceci n’était qu’un ajustement en attendant une réforme en profondeur nécessaire comme l’a déclaré Emmanuel Macron le 11 septembre dernier à Toulouse.
Dans le PLF 2018 la stratégie est amorcée
Par le PLF 2018, le gouvernement souhaite continuer à encourager l’investissement dans la construction de nouveaux logements, renforcer la rénovation urbaine et thermique des logements (10 Mdse seront alloués au NPNRU) et engager la réforme structurelle des APL afin de faire baisser loyers et dépense publique conjointement.
Sur ce dernier point, c’est l’article 52 qui a fait bondir les bailleurs sociaux. Intitulé « Réforme des aides au logement et de la politique des loyers dans le parc social » il rompt un cercle vicieux. Réduire les APL, considérées comme cause de l’augmentation des loyers. Mettre en place simultanément une réduction de loyer de solidarité (RLS) pour ne pas augmenter les dépenses de logement des ménages les plus modestes. Cette mesure, couplée aux autres mesures inscrites au projet – et notamment le gel en 2018 des loyers dans le parc social – dégagerait une économie de 1,7 Md€ en 2018.
L’article 8 prolonge d’un an le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE) « jusqu’à la mise en place d’un mécanisme alternatif plus efficient », c’est-à-dire sa transformation en 2019 en une prime immédiatement perceptible au moment des travaux. Un engagement de campagne du Président.
En revanche, ce dispositif se concentrera désormais sur les équipements, matériaux ou appareils présentant les effets de levier les plus importants et un meilleur rapport coût-bénéfice environnemental. Ainsi, ne seront plus éligibles au CITE, au 28 mars 2018, les dépenses d’acquisition des parois vitrées, de volets isolants et de portes d’entrée donnant sur l’extérieur. Seront également exclues les dépenses d’acquisition de chaudières à haute performance énergétique au fioul. Le taux réduit de 5,5 % de la TVA sera en revanche lui maintenu même pour ces travaux.
Les deux autres mesures essentielles se situent aux articles 39 et 40 et ont pour objectif d’accompagner les investisseurs afin de développer l’offre de logements.
L’article 39 prolonge le dispositif Pinel pour 4 ans, du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2021 uniquement dans les zones tendues. Ceci afin de « maintenir le soutien à la production d’une offre locative supplémentaire dans le secteur intermédiaire » et « de donner de la visibilité aux professionnels de la construction ainsi qu’aux investisseurs ».
Enfin, dans l’article 40 c’est le prêt à taux zéro (PTZ) qui est prolongé pour 4 ans. Considérant que le PTZ « constitue un outil important de soutien à l’accession à la propriété des ménages à revenus modestes et intermédiaires » l’article le prolonge lui aussi pour 4 ans. Tout en proposant de le recentrer progressivement pour les logements neufs aux zones les plus tendues tandis que le PTZ ancien serait lui recentré sur les zones les moins tendues « dans l’objectif de promouvoir la réhabilitation de logements dans ces zones ».
Pour ces deux prolongations, une évaluation du dispositif est prévue à mi-parcours.
L’examen à l’Assemblée
L’examen des crédits alloués à la mission « Cohésion des territoires » et donc à ce début de réforme de la politique du logement s’est déroulé à l’Assemblée nationale dans la nuit du jeudi 2 au vendredi 3 novembre dernier et s’est achevé à la première séance du vendredi 3 novembre.
Le principal point à retenir de ces discussions est le débat enflammé ayant eu lieu sur l’article 52 puisque les députés de l’opposition se sont fait le relais des inquiétudes des bailleurs sociaux. 12 amendements de suppression de l’article avaient d’ailleurs été déposés par eux. Finalement, un amendement compromis du gouvernement a été approuvé, proposant l’étalement sur trois ans de la réforme relative au parc social.
Quant au PTZ, le Président est revenu sur sa volonté de le supprimer dans certaines zones et notamment rurales pour ne pas entraver l’accession et la construction même si le taux ne serait pas le même.Il est également revenu sur la suppression du CITE pour les fenêtres et les chaudières fioul… affaires à suivre.
Le projet de Loi en préparation
Actuellement en discussion avec tous les acteurs du logement, le ministère de la Cohésion des territoires prépare un projet de loi devant mettre en œuvre beaucoup plus largement sa stratégie. Le projet de loi doit être présenté au Parlement au premier trimestre 2018.
Il devra répondre aux 3 objectifs fixés par Jacques Mézard et Julien Denormandie le 20 septembre dernier.
L’objectif n°1 vise à répondre aux besoins démographiques et à soutenir l’économie. Pour ce faire le Gouvernement souhaite accélérer le rythme de construction et simplifier l’acte de construire : en mettant le foncier public au service des projets de territoires ; en facilitant la transformation de bureaux en logements ; en simplifiant les réglementations existantes (réduire le code de la construction à des objectifs en laissant la liberté aux professionnels sur les moyens pour les atteindre) et en ne créant aucune nouvelle norme technique ; en généralisant la dématérialisation des actes, des documents d’urbanisme et des autorisations ; en accordant aux collectivités et aux propriétaires de terrains une incitation fiscale à vendre leurs biens dans les zones tendues ; en luttant contre les recours abusifs pour réduire les délais de construction.
L’objectif n°2 vise à faciliter l’accès à un logement adapté à chacun, selon sa situation et son parcours de vie. Et notamment en substituant des solutions de logement ordinaire à l’hébergement d’urgence grâce au programme « Un logement d’abord » ; en fluidifiant la mobilité dans le parc social et en rendant les attributions plus transparentes ; en construisant 80 000 logements pour les jeunes (actifs et étudiants) et en étendant la caution Visale à tous les étudiants ; en créant de nouveaux contrats de location, plus adaptés aux profils et aux rythmes de vie des locataires : bail mobilité, bail numérique et promotion de la colocation.
Enfin, l’objectif n°3 consiste à rendre les territoires plus attractifs et dynamiques et les logements plus confortables en revitalisant les centres des villes moyennes ; en multipliant les rénovations énergétiques pour éradiquer les bâtiments énergivores et mal isolés ; en reliant toutes les habitations au Haut Débit d’ici 2020 et au Très Haut Débit d’ici 2022 ; en proposant une couverture mobile de qualité partout dès 2020.
Lors des débats du Projet de Loi de Finances le ministre et le secrétaire d’Etat ont déjà fait allusion à quelques points du projet.
Concernant les organismes sociaux, ils prévoient une réforme de structure visant à favoriser les mutualisations et les réorganisations. Une réforme portée par les bailleurs eux-mêmes. Ceci ajouté au travail sur les normes et le foncier devrait aider ces organismes à construire davantage. Le projet de loi devra aussi détailler les financements (durée des prêts, rôle de la Caisse des dépôts, taux du livret A….). Enfin, pour répondre à l’insuffisance de logements et de mobilité au sein du parc social, sera mis en place un mécanisme de mobilité avec les caisses d’attribution des logements.
Le gouvernement souhaite également répondre à la question de l’accession à la propriété pour les ménages modestes. Accession sociale et notamment des logements sociaux de type PLS. ■
1. Déclaration d’Emmanuel Macron aux 24h du bâtiment le 6 octobre dernier.