* Fabien Bouglé est un lanceur d’alerte écologiste français, auteur de nombreux articles et de tribunes sur les éoliennes dans Économie Matin sous le pseudonyme de Louis Marin. Depuis 10 ans, il dénonce le désastre écologique et financier des éoliennes. Il a également été auditionné par la commission d’enquête parlementaire sur les énergies renouvelables de l’Assemblée nationale organisée en 2019. Chef d’entreprise dans le secteur financier et culturel, Fabien Bouglé est également élu municipal.
Un très mauvais bilan carbone
En raisonnant sur un plan écologique, il n’est pas possible d’évoquer la question des éoliennes sans envisager leur bilan carbone. Celui-ci évalue les émissions de gaz à effet de serre qui vont être produites pour la construction d’une centrale éolienne et pendant toute son exploitation. À toutes les étapes, les éoliennes génèrent des émissions de CO2, qu’il s’agisse : d’extraire les matières premières qui leur sont nécessaires, de façonner et fabriquer les éléments des éoliennes ; de les transporter de Chine par porte-conteneurs, puis d’apporter au moyen d’immenses poids-lourds les différents composants sur site ; de procéder à l’installation des éoliennes ; de démanteler les aérogénérateurs ; de nettoyer les sites et recycler les matières premières ; etc.
[...] En outre, le taux de retour énergétique des éoliennes est d’environ vingt pour un. Cela signifie qu’il faut environ un an d’activité à l’éolienne pour produire l’électricité nécessaire à sa fabrication, sur vingt ans de production électrique. Ramené à sa durée de vie, une année entière est donc consacrée uniquement à produire l’électricité nécessaire à la construction de l’aérogénérateur. [...]
Le changement climatique par les éoliennes
L’image de marque de l’éolienne est très sérieusement écornée par les études scientifiques et les comptes rendus des émissions de carbone, liées cette fois-ci à l’activité des éoliennes et non plus seulement liées à leur fabrication et installation.
Une étude scientifique américaine récente a ainsi démontré que les éoliennes contribuaient dans leur fonctionnement au changement climatique. Les chercheurs Lee Miller et David Keith, professeurs d’ingénierie à l’université d’Harvard, ont réalisé une recherche sur les impacts environnementaux de l’activité des éoliennes. Leur résultat a été publié dans la revue scientifique américaine Joule à l’occasion d’un article intitulé « Impacts climatiques de l’énergie éolienne ».
Ces travaux ont un grand retentissement dans la presse scientifique. Les chercheurs ont ainsi pu calculer qu’alimenter l’ensemble des États-Unis en électricité d’origine éolienne aurait pour conséquence un réchauffement de la température au sol de 0,54 degré dans les régions recouvertes d’éoliennes, et de 0,24 degré sur le continent nord-américain. Ils soulignent par ailleurs que déjà dix études antérieures avaient mis en relief un réchauffement local par les centrales éoliennes aux États-Unis. [...]
Menaces sur l’emploi et le tourisme
Les promoteurs éoliens communiquent souvent de façon tonitruante sur les emplois créés par l’installation des éoliennes. À les entendre, le développement de la filière serait un rempart contre le chômage et une voie de développement économique incomparable, promettant des milliers, voire des dizaines de milliers d’emplois. Selon les chiffres de leurs syndicats, la filière éolienne représenterait en 2017 en France environ dix-sept mille emplois (directs ou indirects) avec mille deux cents nouveaux emplois créés dans l’année.
D’autre part, lorsque des pays envisagent une restriction des subventions, voire un arrêt des financements de l’éolien, les lobbyistes font du chantage à l’activité économique et à l’emploi4. Or les emplois créés par la filière éolienne ne sont pas l’expression de l’essor d’une activité classique, mais bien des emplois sous perfusion d’argent public.
En France, on peut mettre en relation directe les dix-sept mille emplois de la filière éolienne avec le milliard quatre cents millions d’euros de subventions publiques qui lui sont versées chaque année.
Chaque emploi créé dans le domaine de l’éolien coûte à la collectivité nationale quatre-vingt-deux mille euros par emploi et par an. On est donc loin d’une activité économique pérenne qui s’autofinance par une activité rentable et arrivée, selon les propres mots des promoteurs éoliens, à maturité. [...]
Pour remédier à ce déficit d’emplois locaux créés, les promoteurs éoliens ont inventé un nouveau concept : le tourisme éolien. Pas d’inquiétude, selon eux : les emplois pourront être générés par de nouvelles activités touristiques comme la visite de centrales éoliennes terrestres ou marines. En mer, affirment-ils, les pêcheurs pourraient ainsi se reconvertir dans des sociétés touristiques de visite d’éoliennes, tandis que, sur terre, les parcs éoliens deviendront de nouveaux parcs d’attractions.
Tout cela n’est malheureusement que de la poudre aux yeux, inventée par les communicants des sociétés éoliennes qui veulent coûte que coûte industrialiser la campagne ou la mer, au risque d’en détruire le tissu socioéconomique – qui vit d’activités économiques artisanales – appelé à être remplacé par ces nouveaux arrivants. Une industrie polluante et subventionnée veut se substituer à des activités économiques équilibrées comme la pêche, pourvoyeuse d’emplois stables, non subventionnés et souvent vertueux écologiquement. [...]
Lobbyistes, ONG, politiciens : des liaisons dangereuses
Alors que Nicolas Hulot, lors de sa démission, a dénoncé la présence des lobbies au sein des cercles de pouvoir, l’affaire des dîners de François de Rugy, son successeur au ministère de l’Écologie, a révélé que parmi les invités se trouvaient un certain nombre de lobbyistes de l’énergie, en particulier des représentants d’Engie, entreprise très investie dans l’installation d’éoliennes terrestres ou côtières.
Dans le domaine des éoliennes, la confusion voire la collusion sont totales entre élus, lobbyistes, ONG ou associations environnementales, et promoteurs. Tout ce monde se soutient, se coopte dans une organisation où tout est fait pour soutenir l’industrie des aérogénérateurs et simplifier leur installation en supprimant tous les freins prévus pour protéger l’environnement et les citoyens. [...]
En France, la proximité entre certaines personnalités et partis politiques, en particulier le PS et EELV (Europe écologie Les Verts), et les acteurs de l’industrie éolienne est édifiante. Si bien que, parfois, il est possible de se demander si certains élus ne sont pas tout simplement les représentants de la filière industrielle éolienne au sein des institutions républicaines. Cette imbrication est d’ailleurs également visible dans d’autres pays comme l’Allemagne par exemple. L’absence de réserve politique de certains élus sur le sujet et leurs interventions sans retenue de plus en plus fréquentes et de moins en moins nuancées lors des colloques des promoteurs éoliens relancent le débat sur la place du lobbying au sein de nos institutions. [...]
L’alerte sur les prises illégales d’intérêt par le SCPC
En juillet 2014, le SCPC, ayant constaté que les prises illégales d’intérêt étaient récurrentes, et avec un mode opératoire analogue, décide d’émettre une alerte dans son rapport d’activité pour 2013 à l’attention du Premier ministre et du ministre de la Justice.
Dans ce document est évoqué un « phénomène d’ampleur » : « Le développement de l’activité éolienne semble s’accompagner de nombreux cas de prises illégales d’intérêt impliquant des élus locaux. » Il ajoute que les élus visés sont attirés par « les revenus substantiels tirés de l’implantation d’éoliennes sur des terrains leur appartenant et par un régime fiscal favorable ». Il émet ensuite une alerte :
Le Service appelle donc l’attention des pouvoirs publics sur la gravité de ce phénomène et rappelle qu’il est impératif d’empêcher et de sanctionner toute confusion entre l’intérêt public, que doivent servir les élus dans le cadre de leur mandat, et l’ intérêt personnel qu’ils peuvent retirer d’une opération qui peut s’avérer litigieuse, particulièrement lorsque ces mêmes élus sont susceptibles de percevoir des redevances de location pour l’ implantation d’ éoliennes sur des terrains leur appartenant ou propriété de leurs proches. Il existe en effet un risque de développement d’atteintes à la probité beaucoup plus graves, comme celui de la corruption. Ce phénomène a déjà pu être constaté dans certains pays européens, dans lesquels serait impliquée la criminalité organisée.
Dévoilé dans la presse, ce rapport a fait l’effet d’une bombe dans le secteur de l’éolien. Il fut suivi d’une série d’émissions de radio et télévisées et d’articles, y compris dans la presse étrangère. L’affaire eut un tel retentissement qu’un syndicat de promoteurs éoliens, France Énergie Éolienne, suggéra sans complexe dans une lettre à une cinquantaine de députés de l’Assemblée nationale d’accélérer la réforme du délit de prise illégale d’intérêt afin d’éviter « que cette infraction ne soit instrumentalisée par les anti-éoliens » qualifiés pour l’occasion dans ce courrier de « militants antirépublicains » (sic).
Immédiatement, la presse s’empara de l’information pour dénoncer ces pratiques de lobbying d’autant plus gênantes et agressives qu’en l’occurrence un syndicat professionnel suggérait nettement aux députés de réformer une infraction pénale qui concernait sa filière.
Cette démarche visait à assouplir la définition de la prise illégale d’intérêts. Si elle avait abouti, elle aurait amené, en vertu du principe d’application de la loi pénale la plus douce (qu’on appelle rétroactivité in mitius), à l’annulation rétroactive de l’ensemble des poursuites en cours, d’où l’insistance et la prise de risque que constituait un tel courrier aux députés.
Finalement, cette vaste opération de lobbying fut un échec cuisant pour les promoteurs : sa médiatisation eut l’effet paradoxal de clore les discussions justement en cours à l’Assemblée sur l’opportunité d’une réforme de la prise illégale d’intérêts. La commission des lois a même purement et simplement annulé la réforme en cours et le président du syndicat des promoteurs éoliens a démissionné.
Depuis, la justice française a prononcé de très nombreuses condamnations pour prise illégale d’intérêts, toutes régions confondues. [...]
L’ombre de Cosa Nostra
[...] Il est intéressant de noter que, tandis que les médias italiens analysent de façon assez précise la corruption et l’intervention de la mafia dans le domaine des éoliennes, en France le sujet reste plutôt tabou. Il est pourtant incontestable que la mafia, en particulier italienne, a véritablement infiltré la filière éolienne. On peut même se demander si elle ne l’a pas elle-même développée, la mafia étant toujours à la pointe des nouvelles technologies qui sont pour elle une opportunité de développement.
À la lumière des derniers rebondissements en Italie, il est même assez probable qu’elle continue à tirer les ficelles de ce secteur économique très rentable via ses holdings situées en Europe ou dans des paradis fiscaux.
La structure des sociétés éoliennes développées dans nos pays en Europe et en France ressemble étrangement aux systèmes en cascade dévoilés par le procureur antimafia italien. Chaque centrale éolienne dans un village (voire chaque éolienne) appartient à une société unique, cette société appartient à une holding « animatrice » qui détient souvent 100 % de ses filiales. La holding « animatrice », qui peut être domiciliée par exemple en France, peut être détenue elle-même par une société luxembourgeoise ou suisse, voire par une société immatriculée dans des paradis fiscaux plus ou moins respectables. Beaucoup de grands groupes éoliens ressemblent donc à une constellation de sociétés à la tête desquelles se trouve la holding de tête, et dont il est parfois impossible de déterminer avec certitude le véritable bénéficiaire économique final.
Une masse d’argent gigantesque comprenant aides européennes, tarifs subventionnés, outils de défiscalisation, etc. se trouve donc aspirée par le biais des éoliennes vers des canaux financiers dont le véritable bénéficiaire est souvent obscur. De petites contributions, au début indolores, imposées sur les factures d’électricité, puis sur l’essence à travers des taxes dites carbone, viennent alimenter des flux financiers importants, qui sont défiscalisés et exportés sans aucun contrôle et avec la complicité bienveillante – voire complice – des élus de certains États qui bénéficient directement ou indirectement de ce racket généralisé. [...] ■
Éoliennes : la Face noire de la transition écologique - Fabien Bouglé – Editions du Rocher - 226 pages
© Avec l’aimable autorisation des éditions du Rocher