Dans une Europe très affaiblie, la France semble ne pas avoir une claire conscience de la gravité de la situation et renoue avec ses démons porteurs de haine et de destruction : le “système désastreux des partis” et les idéologies. Le risque est réel que la France se délite puis disparaisse.
Nous, Français de 2020, sommes investis d’une responsabilité historique majeure au sens le plus fort du terme : en fonction des décisions que nous prendrons, nous ouvrirons le chemin d’un renouveau national, européen et mondial, ou nous participerons à la libération des forces de destruction et resterons dans l’histoire comme les fossoyeurs de la France.
Mais le pire, s’il est possible, n’est JAMAIS certain. Pour l’éviter nous devons créer une dynamique nationale d’apaisement des esprits, de fraternité et de projection vers l’avenir, qui engendrera une dynamique européenne puis mondiale de stabilisation, de pacification et de renouveau.
J’ai exposé les grandes lignes de ce projet dans Rebâtir la France après le COVID 19, et dans un précédent article dans la Revue Parlementaire du 29 avril 2020. J’exposerai ici les seules conditions du succès.
Les conditions indispensables du renouveau
Nous devons transformer notre mode de gouvernance par des innovations radicales mais potentiellement très fécondes. En voici 4.
1) La première et la plus importante est de revenir à la conception de l’homme qui est à la source de notre civilisation européenne et française, et de tout rebâtir sur cette base.
Nous avons oublié les richesses du grand fleuve civilisateur à partir duquel nos ancêtres ont fait la France et l’Europe. Il véhicule une conception de l’homme merveilleusement épanouissante pour chacun et pour toute communauté jusqu’à l’humanité entière, car elle prend en compte l’immense potentiel de l’esprit humain et son existence au-delà de ce seuil appelé « mort » qui, en fait, n’est qu’une nouvelle naissance, l’entrée dans un autre monde, infini et éternel.
Cette conception de l’homme nous vient des Hébreux, des Romains, des Grecs et du Christ. Elle est fondée sur la reconnaissance de l’existence d’une « source de vie » de laquelle tout provient. Les « lois non écrites » qui en émanent ordonnent tout et s’imposent à l’homme comme au cosmos. Elles sont le seul fondement de toute écologie, le seul fondement et le seul rempart de la dignité de l’homme. L’action politique ou économique elle-même ne peut s’y soustraire sauf à consentir à de très graves dérèglements et finalement au chaos.
Déjà Sophocle écrivait à propos de ces « lois non écrites » : « Aucun être mortel ne leur donna le jour, jamais l’oubli ne les endormira, un dieu puissant est en elles, un dieu qui ne vieillit pas. » Plus tôt, le roi David étonné demandait à Yahveh : « … Qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui ?…. Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, mettant toute chose à ses pieds… » Et les chrétiens depuis vingt siècles formulent cette prière : « … tu as fait l’homme à ton image et tu lui as confié l’univers, afin qu’en te servant, toi son créateur, il règne sur la création ».
Cette conception de l’homme « un peu moindre qu’un dieu », appelé à « régner sur la création » s’il respecte les « lois non écrites » inscrites par le créateur ou la nature dans le cosmos entier, nous permettra de fonder une société, une politique, une économie, une science, dédiées à l’épanouissement de chaque être humain, de chaque famille, de chaque nation, et de l’humanité entière.
Car le pouvoir si la richesse, les découvertes scientifiques, le pouvoir sont orientés au service de l’homme, ils serviront aussi son développement personnel. Si, au contraire, l’homme leur est asservi, ils conduiront toujours et inéluctablement au chaos.
2) La seconde condition, est d’adopter une nouvelle pratique de la politique et de l’autorité déduite de cette nouvelle conception de l’homme.
La seule vocation de la politique est de SERVIR la France et les Français, pour les aider à remplir au mieux leurs vocations propres. Hors cela, la politique n’est plus que contrainte, asservissement, carrière. Elle est alors illégitime et tyrannique ; c’est d’ailleurs ainsi que la ressentent des Français de plus en plus nombreux !
L’autorité elle-même est un service, et la vocation du chef, à tout niveau, est de SERVIR à la fois l’entité dont il est responsable et chacun des membres de cette entité, de montrer le chemin vers les sommets, de s’y engager le premier et d’y conduire ceux dont il a la responsabilité. Hors cela, le chef se sert, pour lui-même ou pour des commanditaires parfois mal intentionnés, des pouvoirs qui lui sont conférés, donc des hommes et de l’entité dont il a la charge ; il n’est plus chef mais tyran de fait !
La notion de service conduit à dépasser les seules logiques électorale, gestionnaire et court-termiste, pour penser l’avenir à très long terme à la lumière du passé de notre nation deux fois millénaire, de son être profond et de sa vocation à promouvoir tout homme. Elle nous permettra de rompre avec toutes les idéologies qui s’érigent en absolus et, pour beaucoup, conduisent à l’asservissement de l’homme.
3) La troisième condition, aussi déduite de la même conception de l’homme, est de prendre des mesures concrètes pour rompre avec la culture de la division sur laquelle repose notre société actuelle et toutes les relations humaines peu à peu, que ce soit entre personnes ou entre Etats, pour adopter et mettre en œuvre patiemment mais avec ténacité une culture de vrai dialogue et de recherche de la meilleure voie pour l’épanouissement de chacun et de tous ensemble, jusqu’à l’humanité entière.
Cette démarche ne doit pas être confondue avec le compromis ou la synthèse qui appartiennent à la culture de la division. Elle oblige chacun à l’humilité et conduit tous les décideurs à se référer ensemble à une même conception de l’homme et à ne rechercher que les mesures les plus appropriées au bien des personnes et de chaque communauté.
Mise en œuvre avec ténacité et sans concession par des chefs AU SERVICE, cette démarche permet de transformer des différends en partenariats féconds, d’éviter des conflits sanglants, de sauver des vies aujourd’hui sacrifiées sur l’autel de la recherche de pouvoir ou de richesse. Elle devient un outil de cohésion et de construction collective d’un avenir où l’homme n’est plus systématiquement un « loup pour l’homme ».
4) Enfin, ce projet doit être conduit par des hommes indépendants des partis et n’ayant qu’une seule motivation : SERVIR la France et les Français, quoiqu’il leur en coûte personnellement.
Si l’un de ces hommes a le charisme suffisant pour gagner le coeur des Français, il deviendra le chef que les Français attendent pour que renaisse la France. Comme tant de fois dans son histoire, elle renouera alors avec la grandeur et entraînera le monde, qui l’attend.
Pour conclure
Le Président de la République a la responsabilité suprême de l’avenir de la France. Il a les pouvoirs pour cette transformation radicale. Avec un groupe de travail composé de personnes ayant la culture décrite ci-dessus, il peut, en quelques années, semer les germes d’une France nouvelle et d’un monde nouveau, des germes qui s’épanouiront ensuite, car la vraie politique « laisse le temps au temps. »
Depuis dix ans, j’ai élaboré de nombreuses propositions pour une nouvelle gouvernance ainsi fondée. Elles sont à la disposition des responsables actuels de notre pays, et, sans aucune recherche personnelle, le soldat et l’homme politique que je suis se met lui-même à leur disposition pour un sursaut historique sans lequel la France peut, à la fin de ce siècle, n’être qu’un souvenir.
Notre horizon s’obscurcit. De terribles orages se préparent. N’attendons pas qu’ils éclatent pour agir ! ■
* Auteur de “Rebâtir la France après le COVID 19” (Mareuil Ed. 2020)