Pour sortir au plus vite des méandres où l’on se noie lorsque la boussole n’indique pas de direction claire, nous devons réaffirmer l’ambition politique de la Métropole du Grand Paris : un espace de solidarité intercommunal qui se construit à travers des projets et dont les valeurs cardinales sont l’égalité territoriale et la transition écologique.
La Métropole du Grand Paris est un espace de solidarité intercommunal
Cette belle expression d’« espace de solidarité », issue de la loi Chevènement, nous inspire quelque chose de plus grand que le simple terme administratif d’« Établissement Public de Coopération Intercommunal » au sein duquel le Code Général des Collectivités Territoriales classe la Métropole du Grand Paris. Elle souligne la volonté des maires de créer une collectivité qui dépasse leur commune et de travailler ensemble à effacer les frontières administratives. Plus qu’une coopération, c’est une association de maires, au service du bien commun et par-delà les clivages politiques.
Affirmer la dimension intercommunale de la Métropole c’est aussi veiller à mieux articuler l’espace métropolitain et l’espace régional, sans les confondre. Faire métropole à Paris, Grenoble, Nantes, Lille, Marseille ou Nice, c’est mettre en commun les compétences qui ne peuvent être exercées par un conseil régional. Il ne s’agit pas de se couper de la région, bien évidemment, mais de mettre en place une gouvernance resserrée au niveau de la zone urbaine dense pour mieux répondre aux besoins des habitantes et des habitants. C’est ce que nous faisons en invitant, par exemple, les départements de grande couronne à nos ateliers de réflexion sur l’avenir du boulevard périphérique. Certains transports en commun devraient en ce sens relever demain de la compétence de la Métropole du Grand Paris comme c’est le cas pour la Métropole de Lyon.
Il n’en demeure pas moins vrai que la recherche du bon découpage en matière de compétences, qui passionne tant les initiés, sera, pour les citoyennes et les citoyens, une démarche vaine tant que la Métropole du Grand Paris ne pourra davantage financer de projets.
La Métropole du Grand Paris se construira à travers des projets permettant à chacune et chacun de vivre mieux
Cantonner la Métropole à un simple échelon de planification la priverait de toute aptitude à fédérer. L’incapacité actuelle du gouvernement à trouver une solution pérenne à la crise de son budget la réduit, dans les faits, à cette seule dimension. Il est pourtant grand temps d’agir concrètement, à cette échelle, contre la pollution de l’air, le bruit et le réchauffement climatique, pour la construction de logements accessibles aux classes moyennes et populaires et le développement des pistes cyclables.
Seule la capacité de la Métropole du Grand Paris à financer elle-même des projets d’avenir renforcera ses fondations. Rappelons que celle-ci a été largement sous dotée par rapport aux autres métropoles. Elle ne perçoit que 19 e/habitant, contre plus de 50 e en moyenne pour les autres métropoles. Or, avec 158 quartiers classés prioritaires de la politique de la ville, la Métropole du Grand Paris est un territoire de forts contrastes qui appelle une politique volontariste pour faire progresser partout l’égalité.
Comme pour les régions, cette capacité à financer des projets légitimera son action. C’est elle qui fera naître une « conscience métropolitaine ». Les appels à projets « Inventer la Métropole », qui ont généré 11 milliards d’euros d’investissement privé, la construction du centre aquatique olympique à Saint-Denis ou encore le financement d’ouvrages de prévention des crues ont d’ores et déjà montré que la Métropole sait porter des grands projets. Demain, avec elle et à travers elle, nous porterons des projets pour l’Axe Seine avec Rouen et Le Havre et développerons dans ce cadre les transports décarbonnés, la filière agro-industrielle et les énergies renouvelables.
Faire le « Grand Paris » de l’égalité et de la transition écologique
La crise que nous traversons va accroître encore les inégalités sociales et toucher de plein fouet notre jeunesse. La Seine-Saint-Denis souffre de nombreuses fragilités sociales liées aux conditions de travail, de vie et de santé. À l’image de ce département, le plus jeune de France, la Métropole du Grand Paris est un territoire marqué par sa jeunesse. Elle compte plus de 500 000 étudiantes et étudiants. Soutenir des projets - éducatifs, sportifs et culturels - pour la jeunesse, à l’échelle de la Métropole, permettrait de mettre en commun nos efforts et de progresser sur le chemin de l’égalité réelle.
La crise sanitaire, tout comme la crise climatique, montre la nécessité d’accroître les libertés et les marges de manœuvre locales. L’aptitude des maires à prendre des mesures adaptées à la réalité du terrain doit être mieux valorisée. Les citoyennes et les citoyens aspirent à une démocratie vivante à tous les niveaux, notamment en matière sanitaire et environnementale. Pour cela, il faut plus de transparence et plus de délibération locale. Des mesures comme le confinement, la stratégie vaccinale, les règles liées aux déplacements ou encore la définition d’une activité dite « essentielle » devraient être démocratiquement débattues, à l’échelle du bassin de vie qu’est la Métropole du Grand Paris.
Nous l’avons constaté dans les centres de vaccination : les Grandes-Parisiennes et les Grands-Parisiens ont ignoré les frontières. Dans une proportion non négligeable, des habitantes et des habitants de banlieue sont venus se faire vacciner à Paris et vice-versa. Faut-il le regretter ? Non, il faut en prendre acte et constater que, comme souvent, les usages font voler en éclat les cadres administratifs.
Ces liens spontanés constituent une force exceptionnelle si les maires travaillent ensemble. Seule une assemblée délibérante, qui les réunit toutes et tous, comme celle de la Métropole du Grand Paris, permet d’avancer sur cette voie.
Un exemple de décision nécessaire et importante, prise dans le cadre de cette assemblée, concerne les restrictions de circulation pour les véhicules polluants, enjeu tant sanitaire que climatique. À travers la mise en place de la « zone à faible émission », adoptée à l’unanimité par son Conseil, la Métropole du Grand Paris a su faire naître un consensus grâce à la concertation, la délibération et l’accompagnement des maires.
Renforcer le Grand Paris ne consiste pas à déposséder les communes de leur pouvoir de décision mais à permettre à leurs habitantes et à leurs habitants de bénéficier directement de mesures prises à l’échelle métropolitaine.
Alors, pourquoi attendre ?
Qui a peur d’un Acte II du Grand Paris ?
Comme la région ou les départements, les maires adopteraient de bon cœur cette institution si l’État lui donnait les moyens de ses ambitions. En réalité, n’est-ce pas plutôt les tenants d’un pouvoir centralisé qui, après avoir eu peur de Paris, redouteraient aujourd’hui l’émergence d’une « Métropole des maires » qui priverait l’État d’une partie de son pouvoir ? Le refus persistant du gouvernement de donner à la Métropole du Grand Paris un siège au conseil de surveillance de la Société du Grand Paris, projet le plus structurant pour l’avenir de la Métropole, en est symptomatique.
Passons à l’Acte II du Grand Paris, un nouvel acte qui doit être résolument décentralisateur et orienté vers des projets solidaires et protecteurs de notre planète. ■