Cette dynamique que nous avons mise en place depuis les territoires a aujourd’hui une valeur inestimable non seulement pour nos villes et leurs habitants, mais aussi pour la Francophonie qui peut trouver auprès des autorités locales l’une de ses forces les plus vives et les plus innovantes.
Les Maires, une force de dialogue essentielle au multilatéralisme et aux relations internationales
Partant de la vingtaine de capitales et métropoles francophones qui ont rejoint l’initiative lancée par les Maires de Paris et Québec en 1979, nous sommes aujourd’hui 345 Maires et représentants des grandes villes francophones de 56 pays, réunis au sein de l’AIMF.
Autant de destins croisés qui sont bien souvent l’expression et le fruit de notre histoire commune, celle de la Francophonie. Autant de femmes et d’hommes dont nous sommes, en tant que responsables d’autorités locales, les premiers interlocuteurs.
A l’heure d’un repli sur soi qui se généralise, nous avons auprès d’eux la responsabilité de nourrir l’envie de s’ouvrir au monde, d’en comprendre la complexité, de dialoguer, d’être fiers aussi de ce multiculturalisme qui fait la richesse de nos villes.
Nous avons également la responsabilité de répondre très concrètement aux défis de notre époque qui touchent directement la vie quotidienne de nos concitoyens : le changement climatique qui nous affecte tous, les désordres géopolitiques, les violences que subissent trop souvent les femmes et les populations les plus fragiles, les risques sanitaires… Face aux dérèglements du monde, nous élus locaux sommes en première ligne et devons bien souvent faire face avec les moyens du bord. Cela nourrit une grande solidarité et le besoin de défendre ensemble les sujets que nous avons en commun.
Les relations que nous avons nouées, leur sincérité, leur longévité et leur stabilité ont forgé au fil des années une « Diplomatie des villes », complémentaire à celle des Etats, qui joue d’ores et déjà un rôle central pour faire vivre le multilatéralisme et ouvrir des voies de dialogue. Cette Diplomatie des villes doit être mieux reconnue et il est essentiel de construire un multilatéralisme plus inclusif, qui donne aux autorités locales une voix et une place à la hauteur de leur rôle dans les relations internationales et dans la réponse aux urgences écologiques, sociales, économiques et sécuritaires.
Quelles villes pour quelles sociétés ?
65 % des cibles des 17 Objectifs de Développement Durable définis par l’ONU ne pourront être atteintes que grâce à l’implication des collectivités territoriales. Pour prendre le tournant de l’écologie, pour permettre aux femmes d’occuper la place qui est la leur, pour impulser des dynamiques économiques qui profitent à nos territoires, pour améliorer l’accès à l’éducation et à la culture, pour un numérique éthique et responsable… les solutions que nous développons à l’échelle locale ont un impact majeur et leur portée est globale.
Les jeux olympiques et paralympiques de PARIS 2024 ont montré au monde comment nous pouvons repenser la ville et la transformer pour la rendre plus humaine, plus inclusive et plus ouverte, comment nous pouvons aligner les projets d’une ville comme Paris avec les objectifs du développement durable et les enjeux climatiques. Cette magnifique fête de la Fraternité universelle a été possible grâce aux pays et aux villes de l’espace francophone qui ont soutenu la candidature de Paris et qui nous ont accompagnés pour offrir au monde une olympiade unique, plus respectueuse de l’environnement, en prise directe avec les lieux les plus emblématiques de Paris. Cette belle fête a aussi offert le spectacle d’une ville ouverte sur le monde, fière de ses cultures et de sa langue sublimée par la participation d’artistes tels Amadou et Mariam, Angèle, Aya Nakamura, Céline Dion, Lady Gaga, Lucky Love, Santa et tant d’autres artistes francophones et du monde entier.
Pour autant, ce beau moment de partage ne saurait nous faire oublier que nous manquons encore, trop souvent, de moyens d’agir pour répondre aux besoins et aux attentes de nos concitoyens. Ces moyens ne viendront qu’avec une pleine prise de conscience du rôle incontournable de l’action locale et de la place des responsables que nous sommes pour passer de la parole aux actions concrètes.
Les solutions, nous continuons de les inventer chaque jour. Elles circulent entre nos villes, d’autant mieux que nous coopérons et partageons au sein de nos réseaux internationaux. Et nous les échangeons d’autant plus directement au sein de l’AIMF que nous nous retrouvons autour de notre langue commune et de valeurs partagées. Car par-delà nos différences, nous partageons l’essentiel : la volonté de mettre l’Humain au cœur de nos politiques urbaines, la volonté de répondre à l’enjeu climatique, la justice sociale, l’égalité femmes-hommes, le respect de l’autre et du multiculturalisme, pour construire des villes inclusives, riches de leur diversité, ouvertes et tolérantes.
Repenser la coopération pour renforcer son impact
Sous l’impulsion de l’AIMF et de ses élus, la coopération internationale des villes s’est profondément transformée au cours des dernières décennies dans l’espace francophone.
Le modèle que nous avons développé au fils des années a aujourd’hui valeur d’exemple à l’échelle mondiale. Grâce à cela, l’espace francophone, plus qu’aucun autre dans le monde, est considéré comme le plus porteur d’innovations dans ce que l’on appelle la coopération décentralisée.
En appuyant les projets voulus et directement mis en œuvre par les collectivités locales, en facilitant des coopérations multilatérales, en mobilisant autour de ces projets de terrain des bailleurs et partenaires publics et privés… l’AIMF, que nous avons voulue tournée vers l’action, est un instrument extrêmement efficace de solidarité concrète en Francophonie.
Ce développement nous a permis de gagner la confiance d’un certain nombre de partenaires et de bailleurs : l’Union européenne, la Fondation Bill & Melinda Gates, le SIAAP, les agences françaises de l’eau, la coopération allemande... Cela n’aurait pas été possible si nous n’avions pas pu nous appuyer sur le soutien sans faille que nous apportent de longue date les Etats et gouvernements au premier rang desquels la France, la Wallonie, le Canada, le Québec, et les villes elles-mêmes, qu’elles soient bénéficiaires ou dans une démarche de solidarité.
Au cours de 5 dernières années, ce sont plus de 70 projets de villes dans 25 pays qui ont été appuyés par notre mécanisme de solidarité. Ici pour raccorder à l’eau plusieurs quartiers de la ville. Là pour développer avec les associations un centre d’accompagnement et de lutte contre les violences faites aux femmes. Ailleurs pour construire des équipements sportifs ou culturels. Ailleurs encore pour mettre en place un pôle numérique et soutenir l’entrepreneuriat local.
Avec le temps et l’expérience, nous avons bien sûr construit des programmes de plus en plus intégrés, qui mobilisent plusieurs villes souhaitant s’engager dans des démarches similaires et avancer ensemble. Je pense ici au programme Femmes et énergie durable, mené en partenariat avec 14 communes du Cameroun et qui bénéficie à plus d’un million d’habitants. Ou encore à cette importante initiative menée avec 15 villes pilotes de 9 pays d’Afrique et d’Asie pour développer et financer des solutions d’assainissement autonome là où le rythme effréné de la croissance urbaine oblige à innover.
Chaque année, ce sont ainsi des centaines de milliers d’habitantes et d’habitants des villes francophones qui bénéficient de cette coopération utile et concrète que nous mettons en œuvre en Francophonie à travers l’AIMF. Nous pouvons ensemble en être fiers, car c’est ainsi, avec l’AIMF, que nous faisons vivre notre francophonie de la solidarité, du respect et du partage ! ■